Bon alors salut tout le monde.
-Voilà si je vous ai réunis c’est pour vous dire que nous avons un problème.
-…
-Oui les caisses sont vides. Il ne reste plus de quoi acheter un mètre de pellicule.
-Euh mais on bosse en numérique maintenant non ?
-C’est une image Coco. On n’a plus une thune, ça te parle mieux ?
-Pas grave il suffit de trouver un scénar bidon (j’en ai plein les armoires) de trouver un pigeon, euh un producteur, avec les sous on salarie une ou deux vedettes, soit qui veulent monter en se faisant connaître, soit pas descendre en sombrant dans l’oubli, et puis hop…
-Mouais ça on a déjà essayé, pas sûr que ca rapporte suffisamment. Non faut frapper un grand coup...
- On n’a qu’à décrocher un César ? (rires à la cantonade)
-(rire) et pourquoi pas un Oscar tant que tu y es ?
-De toutes façons les Oscars, c’est blindé, c’est un club privé qui se finance en autarcie. Toujours les mêmes.
-Oui et puis c’est des américains hein, ils ne peuvent pas blairer la culture en général, et les français en particulier.
-Attends je te parle pas d’un film chiant de 2h1/2 avec des réflexions philosophiques sur la vilamourétoussa, sur fond de violon, dans une chaumière normande, non faut que ça pète quoi, de l’action, du sang, du sexe…
-On est morts là, faut dire ce qui est, les américains sont très pros sur ce secteur.
-OK OK alors faut leur passer la brosse à reluire.
- ???
-Faut qu’en message subliminal du film, il y ait « vous êtes super, vous êtes bons, on vous rend hommage, le cinéma c’est vous, on pourra jamais que vous singer… »
-Alors là Coco faut creuser : les amerloques sont tellement imbus d’eux-mêmes qu’ils n’y verront que du feu.
- ( rêvant tout haut) Hollywood…Fred Astaire … Ginger Rogers…
-Tu veux faire une comédie musicale ?
-Non non …. (Voix rêveuse…) plutôt une évocation des artistes du muet, du music hall,
-Faut que ca soit « un peu » exotique, juste qu’ils trouvent ça exotique tu vois ? , mais pas menaçant. Les anglo-saxons adorent parler du « monde dans sa diversité » et se croire humble devant le monde, pourvu que le monde parle anglais et bouffe de la merde.
-La vie d’un artiste de music hall quoi.
-Voilà.
-titre « L’artiste »
-T’écoutes pas ou quoi ? si ya un mot de français ils bouderont, c’est bien trop violent pour des mecs qui mettent du sucre dans la moutarde.
-« The Artist »
-Voilààààààààààà
-Bien sur on tournera ça aux états unis (ca leur plaira beaucoup).
-Et si on tournait en noir et blanc (la pelloche est moins chère)
-(regard noir) tu sais que ce n’est pas si con que ça en a l’air ça ?
-Bon faudra juste un acteur que les américains vont trouver pas menaçant, juste un singe à leur yeux. Les gens adorent voir des singes les imiter : ils lancent des piécettes.
-OK j’appelle l’agence.
-Coco ouvre ton armoire à scénar , je te résume : muet, noir et blanc, ringard, amour niais, drame . So frenchy mais pas trop.
-Au XIX° siècle les puissances coloniales faisaient des zoos humains, et s’extasiaient du pouvoir d’imitation des indigènes.
-Merci pour cet éclairage Bob, dis moi, tu surmonteras tes réticences philosophiques quand tu dormiras sur un matelas de dollars ?
-Oui je pense.
-OK réunion terminée, prochain briefing dans une semaine pour démarrer le tournage de la pompe à fric.
Toute ressemblance avec un fait divers actuel ou une fable du XVII° siècle n'est que pure coincidence.
Les commentaires récents