Avec "la constance du jardinier", John le Carré avait exploré avec talent les relations ambigues entre l'afrique et le
colonialisme britannique, le tout en filigrane d'une intrigue sur les scandales du monde pharmaceutique.
Il s'y réessaye avec "Ie chant de la mission", et cette foi les points de vue sont inversés : l'intrigue est reléguée
au second plan, tandis qu'il explore sans artifice l'écartèlement entre deux cultures.
L'intrigue n'est pas sacrifiée pour autant, sans doute grâce a la facilité de narration de l'auteur, à son verbe précis,
voire précieux, et à sa grande connaissance des services secrets.
Par contre, et bien qu'il s'en défende surement, tout ça est "so british". Il est adorable de voir les trésors
sémantiques déployés par un anglais pour tenter de faire comprendre a son interlocuteur, ici son lecteur, qu'il n'est
pas raciste et voit toutes les cultures sur le même plan. Le texte, dans son architecture, prouve le contraire
et ce n'est pas le choix final du héros, optant résolument pour sa "négritude" qui infirme cette démonstration.
Il ne pouvait en être autrement dans le récit, construit pour celà, dès les premiers chapitres, on voyait bien que
tout ceci n'était qu'artifice de propagande. Bref j'aime bien le carré pour ses facilités narratives exceptionnelles,
mais là, les ficelles sont trop grosses, il me déçoit a vouloir me convaincre que l'impérialisme britannique est révolu.